Légende du basket avec une carrière accomplie au niveau universitaire comme en NBA, Hall of Famer depuis 1980, Oscar Robertson (85 ans) est rangé des voitures depuis plus de quarante ans déjà. Mais le premier joueur à incarner le triple double n’est pas près de quitter le monde de la balle orange.
Le « Big O » n’a ainsi pas manqué de suivre le tournoi olympique parisien. S’il a forcément apprécié le résultat final et la médaille d’or ramenée par le Team USA des « Avengers », il a beaucoup moins apprécié la forme. Et l’impression visuelle d’une équipe finalement assez amorphe sans ses coups de génie individuels.
« Ce qui m’a le plus dérangé, c’est comment un gars peut nous déborder et aller au panier aussi facilement. Les gars ne bougent plus leurs pieds en défense ! [Nikola] Jokic nous a fait passer pour des chèvres, tout ça parce que les arrières ne faisaient pas les efforts pour bloquer leurs gars. Je n’aurais jamais accepté de changer [de défenseur] sur les écrans. Je ne sais pas ce que Coach Kerr faisait mais Team USA a continué à « switcher » et Jokic nous a détruit. Tu ne peux pas me dire que tu veux que Curry se retrouve face à Jokic sous le panier… »
Formé dans l’État d’Indiana dans le basket balbutiant des années 1950, le jeune Robertson est loin de se figer dans des postes et des rôles prédéfinis. Il joue au basket sans se poser de question, dans n’importe quel rôle.
« J’ai appris à jouer au basket quand il n’y avait pas vraiment de position. Mon coach me disait de défendre et faire des écrans retard sur les intérieurs quand il fallait aller chercher les rebonds. De jouer extérieur ou intérieur, ce n’était pas la question », expliquait-il récemment dans le podcast All The Smoke. « Un match où je coachais, je demandais à un gars qui sortait d’une grosse université de jouer extérieur, de placer un peu le jeu. Et lui me répond qu’il ne savait pas faire ! Pour moi, c’était inconcevable. »
L’incroyable Wilt
Champion NBA avec les Bucks en 1971, et un jeune Kareem Abdul-Jabbar, après des années de All-Star et même un titre de MVP en 1964 avec Cincinnati, Oscar Robertson a été une des figures de proue de la NBA.
Tout comme son grand ami, Wilt Chamberlain, une autre locomotive qui a propulsé la jeune Ligue après des débuts cahoteux.
« J’ai adoré jouer contre Wilt car je le connaissais bien. Il parlait beaucoup, il disait ce qu’il allait faire [sur le terrain]. Wilt Chamberlain faisait le show pour son public. Il a porté la NBA à bout de bras pendant des années. Je le dis toujours mais les gens ne s’en souviennent pas forcément : l’année où il a tourné à 50 points par match, je tournais moi en triple-double et c’est pourtant mon bon ami Bill Russell qui a remporté le trophée de MVP ! Parce que son équipe jouait bien et qu’ils ont gagné le titre. Mais quand tu tournes à 50 points sur une saison, et qu’en même temps, je tourne en triple-double la même année, c’est un truc assez remarquable ! »
Ayant passé l’intégralité de sa carrière à croiser le fer avec le légendaire pivot, sauf pour son ultime tour de piste en 1973-74, Oscar Robertson ne tarit pas d’éloges sur son camarade. Un personnage haut en couleurs !
« Wilt était un athlète incroyable. Il faisait du sprint, du saut en hauteur, du volley ball ! Et il parlait autant qu’il pouvait en chemin ! Mais bon, il avait le droit car il mettait tout le monde d’accord sur le terrain. Car il jouait tout le match ou quasiment. Une fois [le 24 novembre 1960], il a fini un match avec 50 rebonds [55, ndlr]. Et je crois que Russell en face avait fini à 48 [19 en fait, ndlr] ! »
Plutôt agacé par les comparaisons généralement défavorables aux joueurs des anciennes générations, donc la sienne, Oscar Robertson reconnaît que le jeu a évolué en plus de cinquante ans. Et c’est normal !
« Wayne Embry faisait 2m03 et 120 kilos, c’était un beau bébé. Quand il jouait contre Wilt, Wilt n’arrivait pas à le pousser sous le cercle comme avec les autres, c’étaient de sacrés combats », se souvient Oscar Robertson le sourire aux lèvres. « Mais, à l’époque, il y avait pas mal de gars qui étaient prêts à sortir les poings. Il fallait juste savoir qui ils étaient et ne pas les titiller inutilement. J’ai été témoin de plusieurs situations moi-même mais c’était en général très rapide. Deux ou trois petits coups et c’était fini. Il n’y avait pas de suspension. C’était une amende règlementaire de 50 dollars, c’est tout ! »
Menacé de mort par le Klan !
Natif du Tennessee, Oscar Robertson n’était évidemment pas étranger au racisme ordinaire de la société américaine, et notamment dans le Sud du pays. Mais il a également révélé qu’il avait tout simplement été menacé de mort par le Klu Klux Klan, alors qu’il allait participer à un tournoi de basket en Alabama.
« Le télégramme disait : ‘si tu joues, nous allons t’abattre’. J’ai simplement donné le papier à mon coach. Et plus tard dans la journée, quelqu’un est venu frapper à ma porte. J’ai ouvert [comme si de rien n’était] et j’ai trouvé un petit gamin blanc d’Alabama qui voulait mon autographe. Eh bien, je lui ai donné. Ça ne m’a pas plus dérangé que ça. Je connaissais le Klan depuis ma jeunesse mais les communautés blanches et noires se protégeaient l’une de l’autre là où j’ai grandi. C’est la seule menace de mort que j’ai reçue dans ma vie et ça ne m’a pas perturbé plus que ça. »
Aussi solide dans son basket que dans sa tête, Oscar Robertson avait de qui tenir avec ses parents qui, dit-il, ne se reposaient que le dimanche… ou quand il pleuvait !
Adepte de « rythm & blues » et de soul, le « Big O » était un métronome sur les planches. Qui a son avis, amusant (car de son âge), sur l’évolution de la scène musicale américaine…
« The Temptations est mon groupe préféré, ce que j’écoute le plus. Mais il y a aussi Fat Domino, les classiques comme Jackie Wilson, Ruth McFadden, The Four Tops. Ah, ils savaient écrire des chansons. De différents types. Rapides, lentes. Il y avait du texte. Ce n’est pas comme maintenant avec des chansons où on n’entend même plus les paroles. »
Oscar Robertson | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
1960-61 | CIN | 71 | 43 | 47.3 | 82.2 | 0.0 | 0.0 | 10.1 | 9.0 | 3.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 30.5 | |
1961-62 | CIN | 79 | 44 | 47.8 | 80.3 | 0.0 | 0.0 | 12.5 | 11.0 | 3.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 30.8 | |
1962-63 | CIN | 80 | 44 | 51.8 | 81.0 | 0.0 | 0.0 | 10.4 | 9.0 | 3.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 28.3 | |
1963-64 ★ | CIN | 79 | 45 | 48.3 | 85.3 | 0.0 | 0.0 | 9.9 | 10.0 | 3.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 31.4 | |
1964-65 | CIN | 75 | 46 | 48.0 | 83.9 | 0.0 | 0.0 | 9.0 | 11.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 30.4 | |
1965-66 | CIN | 76 | 46 | 47.5 | 84.2 | 0.0 | 0.0 | 7.7 | 11.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 31.3 | |
1966-67 | CIN | 79 | 44 | 49.3 | 87.3 | 0.0 | 0.0 | 6.2 | 10.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 30.5 | |
1967-68 | CIN | 65 | 43 | 50.0 | 87.3 | 0.0 | 0.0 | 6.0 | 9.0 | 3.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 29.2 | |
1968-69 | CIN | 79 | 44 | 48.6 | 83.8 | 0.0 | 0.0 | 6.4 | 9.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 24.8 | |
1969-70 | CIN | 69 | 42 | 51.1 | 80.9 | 0.0 | 0.0 | 6.1 | 8.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 25.3 | |
1970-71 | MIL | 81 | 39 | 49.6 | 85.0 | 0.0 | 0.0 | 5.7 | 8.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 19.4 | |
1971-72 | MIL | 64 | 37 | 47.2 | 83.6 | 0.0 | 0.0 | 5.1 | 7.0 | 1.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 17.4 | |
1972-73 | MIL | 73 | 38 | 45.4 | 84.7 | 0.0 | 0.0 | 4.9 | 7.0 | 2.0 | 0.0 | 0.0 | 0.0 | 15.5 | |
1973-74 | MIL | 70 | 35 | 43.8 | 83.5 | 1.0 | 2.0 | 4.0 | 6.0 | 1.0 | 1.0 | 0.0 | 0.0 | 12.7 | |
Total | 1040 | 42 | 48.5 | 83.8 | 1.0 | 2.0 | 7.5 | 9.0 | 2.0 | 1.0 | 0.0 | 0.0 | 25.7 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.