La rumeur prenait de plus en plus d’épaisseur ces dernières semaines et, finalement, Evan Fournier a passé le cap : après douze saisons en NBA, le voilà qui s’envole pour la Grèce, où un contrat de deux ans l’attend à l’Olympiakos, son club préféré en Europe.
À 31 ans, le Français ouvre donc un nouveau chapitre de sa carrière de basketteur, après avoir évolué aux États-Unis depuis 2012, à Denver, Orlando, Boston, New York puis Detroit.
Habitué du Hoop Summit
Pour Evan Fournier, le début de son aventure outre-Atlantique remonte à avril 2011, quand il a participé au célèbre Nike Hoop Summit à Portland. Opposé à Anthony Davis, Bradley Beal, Austin Rivers ou encore Michael Kidd-Gilchrist, et associé à Dario Saric, Bismack Biyombo, Davis Bertans ou encore Raul Neto, le gamin de Charenton s’incline et termine à 6 points, 6 rebonds et 2 passes (en 22 minutes) sous les yeux des recruteurs NBA. Une aventure racontée dans « Jour J », un documentaire co-produit par Basket USA.
De nouveau invité l’année suivante dans l’Oregon, berceau de la marque à la virgule, le Français refuse toutefois d’y aller pour aider son club, Poitiers, à se maintenir en Pro A. Une décision forte pour celui qui a été formé à l’INSEP et qui a démarré chez les professionnels à Nanterre, mais qui ne l’empêchera pas d’être drafté quelques mois plus tard par les Nuggets. Au premier tour et en 20e position !
Peu utilisé à Denver
Evan Fournier passera deux ans dans le Colorado et son année rookie sera la plus marquante collectivement. En effet, il fait partie de cette équipe victorieuse de 57 matchs en saison régulière sous les ordres de George Karl, « Coach de l’année » 2013 viré après avoir été sorti au premier tour des playoffs par les Warriors. Parmi les raisons évoquées de ce licenciement surprise ? Le faible temps de jeu accordé à un certain arrière tricolore (38 matchs pour 5.3 points en 11 minutes)…
La saison suivante, le numéro 94 de Denver joue davantage sous Brian Shaw (76 matchs pour 8.4 points en 20 minutes), sauf que la franchise perd de sa superbe sans Andre Iguodala ni Danilo Gallinari (mais aussi Corey Brewer). En plein été, le Français est alors envoyé à Orlando en échange de Arron Afflalo.
À l’époque, il nous avait expliqué la différence entre ses deux coaches à Denver. « Brian Shaw est un coach plutôt défensif, et puis le jeu est beaucoup plus placé en attaque. Avec George Karl, on avait beaucoup plus de shoots en première intention, un jeu rapide, de la relance et encore de la relance… Shaw est bien plus posé mais il y a forcément des restes du style prôné par Karl vu que la majorité des joueurs étaient déjà là la saison passée. Karl laissait plus de liberté aux joueurs avant les matchs, par exemple en nous laissant manger un peu ce qu’on voulait, ce que notre nouveau coach a changé. Ce sont deux mondes totalement différents. »
Titulaire indiscutable au Magic
En Floride, Evan Fournier va changer de dimension au fil des années. L’équipe est jeune, manque de patience par rapport à son coaching-staff (Jacque Vaughn, James Borrego, Scott Skiles, Frank Vogel puis Steve Clifford se succèdent…) et mettra quatre ans à devenir un minimum compétitive.
Pour autant, le natif du Val-de-Marne en profite donc pour devenir progressivement titulaire et devenir surtout un joueur capable de planter jusqu’à 18 points de moyenne, à de jolis pourcentages de réussite.
« On est là pour mettre en place quelque chose de grand, pas pour faire du médiocre » avait-il confié à son arrivée. « Je crois vraiment en cette équipe et en ce que le staff, GM et coachs, veulent construire. Il y a beaucoup de potentiel dans ce groupe dont deux très bons rookies avec Aaron Gordon et Elfrid Payton. A nous de grandir et de progresser ensemble pour gravir les échelons et monter dans la hiérarchie de la NBA. »
Aux côtés de son grand pote Nikola Vucevic, ainsi que Aaron Gordon, Terrence Ross ou encore DJ Augustin, « More Champagne » finit par retrouver les playoffs en 2019 puis, l’année du Covid-19, il signe la saison la plus productive de sa carrière : 18.5 points, 3.2 passes, 2.6 rebonds et 1.1 interception de moyenne à 47% au tir (dont 40% à 3-points) et 82% aux lancers-francs.
Élément-clé de ce Magic qui compte sur lui, en témoigne sa prolongation de 85 millions de dollars sur cinq ans en 2016, Evan Fournier est cependant sacrifié par les dirigeants floridiens, las de ne pas plus progresser collectivement, au moment de la trade deadline 2021. Direction le Massachusetts, où les Celtics sont prêts à lui faire confiance pour booster leur traction arrière.
Des hauts et des bas à New York
Problème : le passage du Français à Boston n’est pas brillant collectivement, puisque les C’s prennent la porte dès le premier tour des playoffs après un exercice dans le négatif. L’intéressé aura fait ses statistiques, mais les négociations pour sa prolongation n’aboutissent pas et il change d’air au bout de six petits mois.
Un nouveau défi se présente à Evan Fournier et ce sont les Knicks, qui l’ont toujours fait rêver, qui parviennent à l’enrôler dans le cadre d’un sign-and-trade. Il obtient, en prime, un contrat de quatre ans et 78 millions de dollars ! Toujours titulaire et en pleine force de l’âge, le leader d’attaque des Bleus devient un incontournable de la rotation de Tom Thibodeau et ses paniers à 3-points (le record de John Starks est battu) font du bien au collectif, malgré des résultats en dents de scie.
Un soir de janvier 2022, l’arrière qui se rapproche de la trentaine en profite carrément pour attester de sa grande en forme du moment en réussissant le meilleur match de sa carrière NBA : 41 points à 10/14 à 3-points, dans une victoire mémorable face aux… Celtics au Madison Square Garden ! À ce jour, seul Tony Parker a fait mieux au scoring dans le clan tricolore…
« Quand vous traversez une saison avec beaucoup d’irrégularité, vous essayez de trouver un rythme, et ça passe toujours par de la fraîcheur dans l’attitude pour débuter la journée » avait réagi le Français. « Peut-être qu’il y avait un petit surplus de motivation, mais ce n’est pas quelque chose que je fais volontairement contre les Celtics. Mais, effectivement, cela fait trois matches de suite, c’est difficile de dire le contraire, et ce n’est pas une coïncidence. »
Un ultime passage aux Pistons pour retrouver le terrain
Malheureusement, Evan Fournier ne rencontrera plus pareil succès en NBA passée la saison 2021/22. Car, peu après l’ouverture de l’exercice 2022/23, les mauvais résultats de New York obligent Tom Thibodeau à revoir sa rotation et celui-ci décide purement et simplement de sacrifier le Français, à cause notamment de ses limites en défense.
C’est le début de la fin de son expérience new-yorkaise, puisque les « DNP » s’accumulent et les minutes se font rares, l’équipe trouvant la bonne carburation en son absence.
« C’est très dur, c’est sûr. Il y a des jours plus durs que d’autres » nous confiait-il en décembre. « J’essaie de me concentrer sur ce que j’ai à faire dans ma journée. Jour après jour. Je ne me projette pas. J’essaie de gagner ma journée, comme on dit. J’essaie de faire le plus possible avec ce que j’ai. Encore une fois, ce n’est pas facile, mais je n’ai pas le choix : c’est soit ça, soit je me morfonds. »
Finalement, au coeur du mois de février 2024, celui qui se faisait surnommer « Don’t Google Ny Name » est transféré chez les Pistons, où il retrouve du temps de jeu, primordial en vue des Jeux olympiques de Paris où il continuera d’être l’un des hommes de base de Vincent Collet. Sans doute ce qui a poussé plusieurs clubs européens à lui courir après, même si cela n’aura donc pas convaincu une franchise NBA de refaire appel à ses services.
Après avoir inscrit 9 607 points et 1 359 paniers à 3-points en 704 matchs de saison régulière (pour 504 titularisations), et disputé une vingtaine de matchs de playoffs sans jamais franchir l’obstacle du premier tour, Evan Fournier rentre en Europe et il peut se targuer de posséder l’une des meilleures carrières individuelles d’un basketteur français aux États-Unis.
Rien ne dit qu’il ne re-traversera jamais l’Atlantique, mais ses meilleures années semblent derrière lui et, à ce stade de son parcours, il a logiquement jugé préférable d’intégrer l’une des têtes d’affiche du circuit européen, avec du temps de jeu et des objectifs collectifs, plutôt que de rester inactif sur le sol américain.
Evan Fournier | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2012-13 | DEN | 38 | 11 | 49.3 | 40.7 | 76.9 | 0.2 | 0.8 | 0.9 | 1.2 | 1.7 | 0.5 | 0.8 | 0.0 | 5.3 |
2013-14 | DEN | 76 | 20 | 41.9 | 37.6 | 75.6 | 0.5 | 2.2 | 2.7 | 1.5 | 2.4 | 0.5 | 1.3 | 0.1 | 8.4 |
2014-15 | ORL | 58 | 29 | 44.0 | 37.8 | 72.8 | 0.5 | 2.2 | 2.6 | 2.1 | 2.0 | 0.7 | 1.4 | 0.0 | 12.0 |
2015-16 | ORL | 79 | 33 | 46.2 | 40.0 | 83.6 | 0.4 | 2.4 | 2.9 | 2.7 | 2.7 | 1.2 | 1.7 | 0.0 | 15.4 |
2016-17 | ORL | 68 | 33 | 43.9 | 35.6 | 80.5 | 0.7 | 2.4 | 3.1 | 3.0 | 2.7 | 1.0 | 2.1 | 0.1 | 17.2 |
2017-18 | ORL | 57 | 32 | 45.9 | 37.9 | 86.7 | 0.4 | 2.8 | 3.2 | 2.9 | 2.4 | 0.8 | 1.7 | 0.3 | 17.8 |
2018-19 | ORL | 81 | 32 | 43.8 | 34.0 | 80.6 | 0.5 | 2.7 | 3.2 | 3.6 | 2.8 | 0.9 | 1.9 | 0.2 | 15.1 |
2019-20 | ORL | 66 | 31 | 46.7 | 39.9 | 81.8 | 0.3 | 2.3 | 2.6 | 3.2 | 2.4 | 1.1 | 1.9 | 0.2 | 18.5 |
2020-21 * | All Teams | 42 | 30 | 45.7 | 41.3 | 78.8 | 0.2 | 2.8 | 3.1 | 3.4 | 2.3 | 1.1 | 1.7 | 0.5 | 17.1 |
2020-21 * | ORL | 26 | 30 | 46.1 | 38.8 | 79.7 | 0.2 | 2.7 | 2.9 | 3.7 | 2.1 | 1.0 | 2.1 | 0.4 | 19.7 |
2020-21 * | BOS | 16 | 30 | 44.8 | 46.3 | 71.4 | 0.3 | 3.0 | 3.3 | 3.1 | 2.6 | 1.3 | 1.2 | 0.6 | 13.0 |
2021-22 | NYK | 80 | 30 | 41.7 | 38.9 | 70.8 | 0.4 | 2.2 | 2.6 | 2.1 | 2.3 | 1.0 | 1.3 | 0.3 | 14.1 |
2022-23 | NYK | 27 | 17 | 33.7 | 30.7 | 85.7 | 0.2 | 1.7 | 1.8 | 1.3 | 1.7 | 0.6 | 0.8 | 0.1 | 6.1 |
2023-24 * | All Teams | 32 | 18 | 35.7 | 25.4 | 80.6 | 0.2 | 1.7 | 1.8 | 1.5 | 1.5 | 0.9 | 0.7 | 0.2 | 6.9 |
2023-24 * | DET | 29 | 19 | 37.3 | 27.0 | 79.4 | 0.2 | 1.7 | 1.9 | 1.6 | 1.5 | 0.9 | 0.7 | 0.2 | 7.2 |
2023-24 * | NYK | 3 | 13 | 20.0 | 13.3 | 100.0 | 0.0 | 1.3 | 1.3 | 1.0 | 1.3 | 1.3 | 0.3 | 0.0 | 4.0 |
Total | 704 | 28 | 44.1 | 37.4 | 79.9 | 0.4 | 2.3 | 2.7 | 2.5 | 2.3 | 0.9 | 1.5 | 0.2 | 13.7 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.